Un expert répond à vos questions…
Aujourd’hui, je voudrais vous livrer le fruit de mes recherches et de mes interrogations sur l’incidence de l’humidité sur la qualité de l’air intérieur et les consommations d’énergie dans l’habitat ou le bureau.
Quand j’ai commencé mes investigations en thermique du bâtiment, je me suis heurté à une quantité de personnes qui m’ont toujours affirmé qu’un mur devait être perspirant… Mais quand j’ai abordé ce passage dans mes recherches au laboratoire voici plus de 20 ans, je me suis aperçu qu’avoir des murs perspirants posait un énorme problème thermique, non pas parce que les calories s’échappaient mais pour tout autre chose.
Petite explication, que je souhaite simple : quand on chauffe un matériau, il y a dilatation ; eh bien, pour l’air, c’est la même chose. Vous chauffez votre maison quand dehors il fait froid. Que se passe-t-il ? Comme vous chauffez de l’air dans un local fermé, la pression de l’air augmente ; donc, à l’intérieur, vous avez de la haute pression et, à l’extérieur, de la basse pression. Une règle élémentaire de physique s’applique : les pressions cherchent toujours à s’équilibrer. Exemple : vous crevez un pneu, la haute pression de l’intérieur s’échappe à l’extérieur.
Ce phénomène de pressions n’est qu’une des données à prendre en considération. À l’intérieur de la maison, la vie est source de pollutions et aussi d’humidité. Prenons cette dernière : l’humidité. Vous respirez, vous produisez de l’humidité ; vous faites cuire des pâtes, vous produisez de l’humidité ; vous prenez une douche, idem ; etc. Et, finalement, un taux important d’humidité sous forme de vapeur d’eau est présent dans l’air ambiant.
Revenons à nos pressions… Si le mur est perspirant, la haute pression migre à travers lui pour s’échapper et s’équilibrer avec la basse pression. En migrant, elle transporte cette vapeur d’eau à travers le mur. Jusquelà, pas de soucis. Mais quand cet air humide rencontre la partie froide, il y a un changement d’état (condensation) : la vapeur se transforme en gouttelettes. Ces gouttelettes se déposent dans le mur et viennent dégrader celui-ci, et plus particulièrement les isolants hygrosensibles, comme ceux d’origine minérale.
Sachant que l’air est un mauvais véhicule thermique – au contraire de l’eau qui est un des meilleurs transmetteurs thermiques –, la paroi devient très déperditive, d’où une forte consommation énergétique.
Nombre d’artisans voyant un mur humide ont toujours pensé que c’était la pluie qui le mouillait ; c’est pourquoi ils ont toujours appliqué des revêtements étanches sur les façades et n’ont fait qu’aggraver le phénomène, pensant le réparer. C’est pour cela que vous voyez maintes façades dégradées : les enduits qui tombent ou des poches d’eau sous les peintures étanches.
Il existe plusieurs solutions
Soit on maintient des murs perspirants, mais on rééquilibre les pressions par une ventilation naturelle (une ventilation naturelle ne consiste pas à ouvrir les fenêtres mais fonctionne via des grilles d’aération « passive » qui font rentrer de l’air extérieur et sortir l’air intérieur vicié) ou mécanique. Et, surtout, on laisse la migration se faire jusqu’au bout.
Soit on fait un mur étanche avec une gestion mécanique de l’air intérieur. C’est généralement cette seconde solution qui est thermiquement la plus performante.
Dans tous les cas de figure, dites-vous bien que ce ne sont pas les quelques calories qui vont s’échapper à travers le mur qui vont augmenter la facture énergétique, mais bien la perte de performance thermique due à la forte humidité du mur.
Pour rappel, un mur épais n’est en aucun cas un gage de performance thermique, bien au contraire, et encore plus s’il est humide. Un mur humide est jusqu’à 20 fois plus déperditif qu’un mur sec.
Revenons à la qualité de l’air intérieur.
Où l’air est-il généralement le plus pollué ?
À l’intérieur ou à l’extérieur ?
Sauf de très rares exceptions, c’est l’air intérieur qui est le plus pollué ; si c’est le contraire, sauvez-vous de là !
Revenons aux réalités.
De multiples sources de polluants sont présentes dans l’habitat, au bureau, à l’école. Ces polluants sont de diverses origines. Le CO2 (dioxyde de carbone) est le fruit de la respiration humaine. L’humidité mal gérée provoque des micro-champignons.
Le mobilier industriel à base d’aggloméré (OSB ou MDF), les peintures, tous ces éléments contiennent des composants organiques volatils (COV), qui s’évaporent au fil du temps, possiblement durant des années.
Les produits d’entretien, les acariens, pollens, poussières, nos charmants animaux de compagnie, etc. en sont la source. La liste est bien plus longue que vous ne pensez.
Aussi, il convient de renouveler l’air intérieur plusieurs fois par jour, quels que soient les principes utilisés. IL FAUT VENTILER.
Peu de personnes dans une pièce : le volume doit être renouvelé toutes les 2 heures.
Dans les bureaux, c’est toutes les heures et, plus vous êtes nombreux, plus il vous faut renouveler souvent l’air ambiant. Dans les écoles, il faut renouveler l’air de 1,5 à 2 fois le volume de la pièce en 1 heure. Le taux de renouvellement d’air dépend du nombre d’enfants ou de personnes et du volume de la pièce.
Dans les pays du nord, la coutume est la ventilation manuelle par ouverture des fenêtres plusieurs fois par jour. Quelques minutes suffisent. Ce n’est pas cela qui va augmenter la facture de chauffage. En 5 minutes, la masse thermique de la maison ne va pas refroidir, c’est seulement l’air intérieur qui sera plus frais. Une fois les fenêtres fermées, l’air se réchauffera presque instantanément sans grosse consommation d’énergie.
On peut aussi opter pour la ventilation mécanique, soit à simple flux, soit à double flux.
Simple flux : soit par insufflation mécanique d’air neuf, soit par l’aspiration de l’air vicié dans les pièces humides. Dans les deux cas, il faut des entrées ou sorties d’air bien dimensionnées.
Et puis, ma préférée, la VMC à double flux. Elle permet de réchauffer l’air neuf avec l’air vicié, sans que jamais ils ne se mélangent, mais simplement par échange thermique. Attention, faites-vous accompagner par le bon prestataire car cela se calcule. L’installation d’une ventilation ne s’improvise pas, les pressions doivent être équilibrées, les points d’aspiration et de soufflage doivent être bien pensés pour un bon balayage. Toute l’installation et les gaines de distribution doivent IMPÉRATIVEMENT être dans le volume chauffé de la maison.
Pour information, l’air étant un mauvais véhicule thermique, il se met instantanément à la température du contenant. Si les gaines se trouvent dans les combles, mêmes isolés, cela ne fonctionnera pas.
Bien dimensionnée et bien installée, la ventilation est un gage de qualité de l’air intérieur et d’économies d’énergie (l’économie de chauffage peut se situer entre 5 et 10 %). Petite contrainte : pour votre bienêtre, pensez à changer les filtres selon les recommandations du constructeur.
J’en profite pour vous souhaiter une merveilleuse année 2020 écoresponsable.
Patrick Denieul
La Maison de l’économie d’énergie
133 bis avenue François Verdier – 81000 Albi
06 70 14 10 47 / 05 63 76 12 60
patrick.denieul@lamecoenergie.fr