L’anxiété, c’est cette petite boule à l’estomac, cette attente plus ou moins consciente d’un danger ou d’un problème à venir. Tout le monde y sera confronté au moins une fois dans sa vie et il n’y a absolument pas lieu de s’inquiéter… Sauf quand cette anxiété s’installe. Elle commence alors à irradier l’organisme, parfois jusqu’à provoquer stress, insomnies, palpitations cardiaques ou sautes d’humeur. Le corps et l’esprit s’associent dans une spirale compliquée à vivre. Ce sont ces deux parties de nous-même que l’Ayurveda prend en considération pour proposer tout une palette de solutions utiles face aux préoccupations du quotidien, petites ou grandes…
On peut se l’avouer : nous connaissons tous cette période où un petit souci nous trotte dans la tête. Au départ, c’est une intuition, un mauvais pressentiment à propos de quelque chose qui va mal tourner… Et puis ce petit souci s’installe, il prend ses aises. Parfois, il nous empêche de manger ou de dormir. Peu à peu, il se transforme en véritable démon qui nous gâche l’existence. C’est ce petit démon que l’on appelle l’anxiété !
Bien entendu, nous avons tous un degré différent de tolérance à l’anxiété. Entre les individus qui rencontrent occasionnellement le « petit démon » et ceux qui vivent totalement sous son joug, il y a un monde !
Selon l’Ayurveda, notre degré de résistance à l’anxiété est relié à notre constitution, c’est-à-dire à l’état ordinaire des équilibres doshiques. Si le petit démon est trop présent, c’est que les doshas sont mal équilibrés !
Les sujets d’anxiété variables selon les doshas dominants
> L’anxiété de type Vata est le résultat d’une activité nerveuse excessive, de pensées et d’inquiétudes trop nombreuses ou de changements trop brutaux.
> L’anxiété de type Pitta provient, la plupart du temps, d’une réticence à lâcher prise. Les personnes Pitta veulent contrôler leur vie et tout ce qui leur arrive. Elles sont anxieuses quand ce contrôle est amoindri.
> L’anxiété de type Kapha découle généralement de la perte de ses biens et de ses attachements. C’est la fin d’une époque et Kapha angoisse à l’idée de ce qui pourrait arriver.
Vous l’aurez compris, si un dosha est en excès dans votre constitution du moment, vous serez davantage susceptible de développer son énergie négative.
Même si le déséquilibre d’un des trois doshas, quel qu’il soit, peut être responsable de nos troubles, c’est le dosha Vata, quand il est exagérément présent dans l’organisme, qui engendre l’anxiété, la peur, la confusion… quitte à avoir des réactions disproportionnées ! Il vaut donc mieux chercher à l’apaiser si vous présentez ces signes.
Apaiser Vata, dosha de l’anxiété
Les personnalités Vata auraient besoin de régularité dans leur vie et de la maintenir, mais cela est difficile pour elles, avides de créativité, de vitalité et de liberté ! Dites-vous que l’anxiété ne pourra être apaisée qu’avec une certaine routine : des horaires de repas fixes, et une ou des activités constantes. Vous dormirez mieux la nuit et votre appétit sera aiguisé.
Attention, compte tenu de la fantaisie d’une personnalité Vata, vous risquez de vouloir abandonner cette régularité une fois que les énergies seront ajustées. Or, en Ayurveda, il faut toujours maintenir l’équilibre, donc restez sur le rythme qui vous a conduit à ce bien-être même s’il faut parfois vous forcer. Si vous avez choisi de vous coucher chaque soir à 22 h 30, par exemple, il faudra poursuivre cet effort, même quand vous aurez l’impression de ne plus en avoir besoin !
La manifestation « chimique » de l’anxiété
Selon les dernières recherches scientifiques, un dysfonctionnement de certains neurotransmetteurs serait à l’origine du trouble anxieux. Ces petites substances servent de messagers aux influx nerveux afin que les neurones communiquent entre eux, idéalement d’une manière positive pour que nous restions de bonne humeur.
Le GABA (acide gamma-aminobutyrique) en fait partie et c’est notamment le principal inhibiteur de toutes les réactions excessives des neurones. Vous ne le connaissez peut-être pas, mais c’est lui qui tempère notre comportement ; il est vrai que l’on parle plus souvent de la noradrénaline, de la sérotonine et du cortisol (hormone du stress).
Revenons au GABA. C’est donc le neurotransmetteur du calme et de la récupération. Dans l’hippocampe, là où se niche l’aire de la mémoire dans le cerveau, le GABA aide à maîtriser les « idées noires », à éviter de ressasser ; c’est dire s’il a une fonction essentielle dans les troubles de l’anxiété.
Comment fournir le GABA à notre organisme ?
Le GABA est naturellement présent dans des végétaux, comme la châtaigne, la pomme de terre, le riz, l’astragale et certains thés, mais il est avant tout synthétisé en interne, dans notre organisme. Pour favoriser sa production, il faut faire le plein de vitamines du groupe B, en particulier la B6, de thé vert riche en L-théanine et de spiruline, pour ne citer qu’eux.
Selon l’Ayurveda, l’ashwagandha a également une action sur le GABA. Cette plante adaptogène détend les esprits agités. Riche en substances actives, elle a de nombreuses vertus. Ainsi, outre son effet sur l’anxiété, on pourra noter que l’ashwagandha stimule la libido, réveille la vitalité et favorise le sommeil, d’où son nom scientifique de Withania somnifera. Le fait que ce soit une plante adaptogène lui permet d’agir sur l’organisme là où celui-ci en a le plus besoin.
La plante ayurvédique de la sérénité
Une autre plante indienne s’oppose aux manifestations « chimiques » de l’anxiété et notamment sur les neurotransmetteurs autres que le GABA…
Connue depuis toujours en Inde pour ses vertus sur le cerveau, elle est utilisée en médecine ayurvédique pour réveiller la motivation, l’envie d’aller au bout des choses. Bref, ce végétal est un concentré de joie de vivre.
Le nom de cette plante est le mucuna, également appelé Mucuna pruriens ou pois mascate. Le mucuna travaille aussi simplement qu’efficacement dans l’organisme en stimulant la dopamine. Nous fabriquons normalement cette petite molécule du bonheur en dormant ; mais, pour de multiples raisons organiques, nous pouvons en manquer parfois. C’est le cas, entre autres des personnes atteintes de la maladie de Parkinson, d’après de nombreux chercheurs. Quand nous manquons de dopamine, notre système nerveux ne reçoit plus les messages et notre comportement s’altère.
Selon une étude scientifique parue en août 2017 dans la revue Neurology, le mucuna serait aussi efficace que certains médicaments connus pour pallier un déficit en dopamine !
La pureté mentale, un équilibre à trouver
En Ayurveda, la pureté mentale s’appelle Sattva : c’est le point d’équilibre absolu, quand vous vous sentez détendu·e, serein·e. Sattva a besoin de calme, de silence et d’espace pour se renouveler. Comme on peut s’en douter, cet équilibre s’épuise dans l’action, le bruit, l’agitation ou les grands débats philosophiques.
Pour comprendre cette notion et la remettre en perspective dans notre société occidentale, il suffit d’imaginer les différences qui existent entre un dimanche passé à table à manger gras et à discuter bruyamment avec la télévision en fond sonore et un dimanche où vous vous seriez promené·e dans des champs, sans bruit, après un repas léger.
Spontanément, en visualisant les deux situations, vous ressentez la différence. Sattva s’épanouira naturellement dans le deuxième cas. Il n’est toutefois pas question de se priver d’un plaisir au détriment d’un autre, mais de les équilibrer en fonction de nos vrais besoins.
Si la pureté mentale Sattva est essentielle en Ayurveda, elle a tendance à passer au second plan dans notre société contemporaine. Cette dernière pourrait d’ailleurs être qualifiée de rajasique, de rajas (la colère, la haine, la peur, les soucis et l’anxiété). En effet, nous sommes toujours sollicités pour voyager plus, bouger plus, courir ou nous divertir. Dans l’air du temps ou les messages publicitaires et médiatiques que nous recevons, la paix et la sérénité sont assez peu cultivées…
Même si des pratiques telles que la méditation ou le yoga imprègnent de plus en plus le quotidien des Occidentaux, elles n’entrent pas encore dans la catégorie d’un mode de vie, mais plutôt dans celle des loisirs. En effet, alors qu’en Inde ces disciplines sont pratiquées en toute simplicité, dans un salon, une chambre ou au pied d’un arbre, en France, elles nécessitent une logistique qui peut contrer leurs effets positifs.
À titre d’illustration, si le cours de yoga commence à une heure bien précise et qu’il a nécessité une organisation millimétrée, voire stressante, pour entrer dans l’emploi du temps avec une course aux transports pour s’y rendre, les bienfaits de sa pratique risquent d’être estompés ! Le mieux est donc d’adapter son emploi du temps à sa pratique et de la faire entrer dans notre quotidien avec simplicité, comme une évidence.
L’alimentation, clé du bien-être
Si vous avez un médicament à prendre, vous regarderez s’il faut l’ingérer avant le repas, pendant ou en dehors, s’il faut le laisser fondre sous la langue ou l’avaler d’un coup… En Ayurveda, manger est à la fois prendre du plaisir et se soigner ; donc, comme vous le feriez avec n’importe quel « traitement », il est essentiel de connaître la qualité des aliments et ce qu’ils vous apportent en matière de satisfaction, que ce soit au niveau du goût ou des nutriments.
Au moment de faire vos courses, gardez en tête que la nourriture doit toujours être choisie en fonction de ses apports nutritionnels, de son goût, de ses effets sur le corps et de ses qualités sur les doshas.
La manière la plus simple pour préparer les repas en tenant compte des spécificités ayurvédiques est donc de saupoudrer les mets de quelques épices particulièrement intéressantes pour lutter contre l’anxiété.
L’anis vert est une plante utilisée comme épice. Elle apaise la soif et les maux de ventre, mais c’est aussi une alliée de la sérénité.
La cardamome atténue le hoquet nerveux, souvent dû à une mauvaise respiration et à l’anxiété.
Le clou de girofle est un neurotonique : il a des effets sur la fatigue physique autant qu’intellectuelle.
La coriandre est tonifiante et stimulante. Toutes ces épices sont excellentes à ajouter dans les plats pour un début de sérénité, mais la vraie star, la plus efficace, est sans doute le curcuma.
Avec 10 000 études au compteur et plus de 600 bienfaits démontrés, cette épice ancestrale indienne est considérée par beaucoup comme l’épice la plus importante de l’Ayurveda. Non seulement le curcuma intervient sur les douleurs – dont les douleurs articulaires –, la digestion ou bien encore le système immunitaire, mais, en plus, il stimule le fonctionnement du cerveau, distille des vertus antistress et calme l’anxiété !
Pour aller plus loin sur le sujet. Lisez Épices : une pincée d’équilibre au quotidien
L’Ayurveda englobe l’alimentation, le yoga, la méditation, l’automassage, les plantes, etc., dans une routine quotidienne. Prendre soin de sa santé grâce à tous ces « outils » est évident en Inde et c’est cette évidence sur laquelle les Occidentaux doivent « travailler ».
Il ne faut pas hésiter à faire entrer toutes ces pratiques dans nos rituels, au même titre que boire un café ou juste respirer. C’est un véritable changement de fonctionnement qui aide à vaincre l’anxiété et ses symptômes.
Le yoga
Cette pratique qui devient tendance est un ensemble de postures et d’exercices de respiration qui vise à apporter un bien-être physique et mental. Il ne se dissocie par des autres pratiques ayurvédiques, telles que la méditation, mais il les complète.
Le mot yoga vient d’ailleurs du mot sanskrit yuj, qui peut se traduire par lier ou unir. Ce qui signifie, selon l’Ayurveda, l’intégration de tous les aspects de l’individu – le corps avec l’esprit et l’esprit avec l’âme – afin de parvenir à une vie heureuse, équilibrée et utile. Le yoga est une attention particulière portée à notre corps, à l’écouter et à l’étirer.
Cinq grands principes animent le hatha yoga, principale technique de yoga en Ayurveda :
> Pratiquer des exercices appropriés à son corps (postures ou asanas),
> Adopter une respiration sereine (pranayama),
> Utiliser une technique de relaxation (pour atteindre le repos physique, mental et spirituel),
> Avoir un régime alimentaire sain (nourriture fraîche, de couleur vive, végétale et si possible sans produits chimiques),
> Coupler la pensée positive à la méditation (pour prendre conscience de ce qui nous entoure, de ce qui existe, de ce qui est).
La méditation
Dans son livre Méditer, Aurélie Godefroy cite Yongey Mingyour Rimpotché, un jeune moine bouddhiste qui inscrit la méditation dans notre époque : « de simples exercices quotidiens de méditation (au bureau, dans le métro ou même dans la rue), consistant à laisser aller et venir nos pensées sans y attacher d’importance mais sans les rejeter non plus, peuvent changer notre vision du monde et répondre à nos préoccupations essentielles. En pratiquant cinq minutes par jour, cette nouvelle habitude devrait s’ancrer dans votre quotidien en trois semaines environ. »
Difficile de pratiquer plus simplement cette discipline de l’intime !
Et, avec la méditation, la centella asiatica
La centella asiatica est utilisée en Ayurveda pour aviver l’intelligence en plus de cicatriser les plaies et d’assainir la peau !
Stimulante des fonctions cérébrales, elle aide aussi à la concentration pour méditer. En cas d’agitation mentale, la centella diminue l’anxiété et améliore la clarté d’esprit.
Le massage ou l’automassage
Il n’est pas toujours évident de disposer d’un masseur professionnel ; c’est pourquoi il est important d’apprendre à s’automasser. Cette pratique devrait devenir un rituel matin et soir. Très simple à mettre en application, elle stimule des fonctions vitales, comme la circulation sanguine ou la digestion. En effet, prenez l’habitude d’appliquer de l’huile sur votre corps en massant pendant quelques secondes les parties qui peuvent être douloureuses, comme les épaules, les articulations, ou qui vous soutiennent toute la journée, comme les jambes.
L’automassage est de plus en plus reconnu par la communauté scientifique pour la simple et bonne raison qu’il n’a rien de subjectif mais présente une réelle action sur l’organisme.
En effet, les massages dynamisent les récepteurs cutanés, musculaires, tendineux, ces mêmes récepteurs qui envoient des messages au cerveau. Si vous avez mal au ventre, par exemple, massez votre région abdominale pour qu’elle envoie une information de soulagement sous forme d’impulsion nerveuse à votre cerveau. Celui-ci traitera alors l’information et déclenchera une série de réactions pour soulager effectivement votre ventre. Eh oui, les endorphines sont stimulées par le massage et leur effet antidouleur est particulièrement appréciable !
Les plantes
Le mucuna, l’ashwagandha, la centella asiatica : nous avons déjà vu l’importance de ces trois plantes dans la sérénité ayurvédique ; mais il en existe d’autres qui agissent moins directement sur les fonctions neuronales… Selon l’Ayurveda, l’anxiété s’interprète aussi comme « avoir un noeud à l’estomac »… Au sens premier du terme. C’est-à-dire que la digestion des émotions autant que des aliments se passe mal. À cela, un thérapeute ayurvédique répondra immédiatement avec un complexe de trois baies : le triphala. Préparation ancestrale de l’Inde, elle se compose d’amalaki, haritaki et bibhitaki. Le triphala sert à favoriser la digestion, mais aussi le transit intestinal et l’élimination, en douceur.
En conclusion
Finalement, faut-il lutter contre l’anxiété ou simplement apprendre à gérer ses émotions avec l’Ayurveda ? L’anxiété trop exacerbée conduit au stress, qui peut nuire à la santé. Toutefois, elle a son utilité : elle nous rend prudents par anticipation de ce qui pourrait arriver. La vivre en harmonie avec l’Ayurveda, c’est donc être à l’écoute de ses propres émotions et apprendre à les gérer sereinement au lieu de vouloir les faire disparaître.
À SAVOIR
Selon l’Ayurveda, les troubles psychologiques comme l’anxiété sont le signe d’une séparation entre le corps et l’âme. L’Ayurveda s’attache à les réconcilier par différentes pratiques.
Source : AYur-vana