avec Véronique Liesse
Diététicienne, nutritionniste, micronutritionniste et nutrithérapeute
Pour la sortie de son ouvrage Ma bible pour perdre du poids sans régime, aux éditions Leduc, Véronique Liesse nous livre en exclusivité quelques clés pour mincir durablement. Véronique Liesse est diététicienne, nutritionniste et formatrice en entreprises pour optimiser énergie, bien-être et performance au travail. Elle enseigne et forme à la nutrition.
Il existe de nombreux ouvrages sur les régimes et les rééquilibrages nutritionnels. Quel nouvel éclairage nous apportez-vous ?
Qu’il est temps d’arrêter de compter les calories et de comprendre que la prise ou la perte de poids est un problème complexe et multifactoriel.
La majorité des livres abordent cette problématique sous l’angle des régimes et c’est justement cela qui entraîne des mécanismes de yo-yo ascendant. Ce livre traite de tous les aspects qu’il faut considérer pour entreprendre une perte de poids réussie. Il décrit étape par étape tous les aspects à envisager pour réussir un programme de perte de poids de façon durable. Tous les aspects importants y sont détaillés : l’assiette bien sûr, mais aussi tous les freins physiologiques, et notamment le microbiote, les blocages hormonaux et mentaux, ainsi que tous les éléments de notre mode de vie impliqués dans la prise et la perte de poids.
Vous utilisez dans votre ouvrage le terme « amaigrissologie ». Pourquoi ce néologisme et quels messages souhaitez-vous faire passer ?
« L’amaigrissologie » induit, par définition, d’avoir recours à toute stratégie visant à une perte de poids rapide. C’est malheureusement ce que la plupart des gens souhaitent et c’est vrai depuis la nuit des temps. Ce qui prouve bien que les régimes ne marchent pas et, même, aggravent le problème. Le but ultime doit être de prendre soin de soi, d’être en bonne santé, ce qui induit de ne pas traumatiser son corps.
Vous écrivez que les régimes reposent sur deux croyances erronées :
pour mincir, il faut avoir de la volonté ;
pour mincir, il faut réduire son apport en calories.
Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ?
Ces 2 phrases sont extraites de la préface de mon livre, écrite par Florian Saffer – diététicien spécialisé en comportement alimentaire –, qu’il a eu la gentillesse de rédiger.
Et je partage totalement son avis. La volonté implique des frustrations, ce qui n’est pas tenable dans le temps. À la place de la volonté, il faut avoir simplement l’envie de prendre soin de soi et de mettre en place des choses de façon bienveillante et qui nous font du bien pour toujours.
À l’exception des personnes qui mangent réellement trop, ce qui n’est bien sûr pas souhaitable, le problème se situe la plupart du temps bien plus du côté de la qualité que du côté de la quantité.
Si réduire les calories était la solution, il y a longtemps que la question de l’obésité serait réglée. Le problème est donc bien plus complexe et la solution réside dans la nécessité de comprendre l’origine des dérèglements et de les prendre en charge.
Pour perdre du poids sans régime, quels sont les 5 grands leviers d’action dont nous disposons ?
– Il faut tout d’abord que ce soit le bon moment. L’objectif doit être clair et « aspirationnel ». Perdre 10 kg n’a rien de très motivant. C’est ce que ça va permettre de faire qui l’est !
– Bien entendu, l’assiette joue un rôle central. Indépendamment des calories, il va falloir miser sur la qualité car des glucides, des lipides ou des protéines ne sont pas stockés ou déstockés de la même façon, quelle que soit leur origine. De plus, des déficits en micronutriments peuvent empêcher un fonctionnement métabolique normal et ruiner toutes les tentatives.
– Il semble de plus en plus évident que notre corps répond à des rythmes biologiques bien spécifiques. C’est là qu’intervient la chrononutrition. Pour être bien régulé physiologiquement, le corps a besoin de manger à certains moments précis. Nous vivons de façon de plus en plus désynchronisée, ce qui, encore une fois, dérégule notre organisme.
– Il existe de nombreux freins à la perte de poids, qu’il va falloir aborder également. Troubles métaboliques, hormonaux, pollution environnementale, déséquilibre du microbiote… Ce sont quelques exemples des freins décrits dans ce livre et qu’il va falloir prendre en charge.
– Enfin, n’oublions pas l’aspect psychologique. Notre cerveau nous joue parfois bien des tours ; il fabrique tout un tas d’idées qui ne nous aident pas à avancer dans la bonne direction.
Les glucides ont de plus en plus mauvaises presse. Qu’en pensez-vous ?
C’est justement ce type de généralisation qu’il faudrait idéalement éviter. Comment peut-on croire que les effets métaboliques d’un paquet de bonbons, de chips, d’un soda ou une portion de lentilles ont les mêmes effets métaboliques sur l’organisme ? Ce qui prouve bien qu’il est temps d’arrêter de compter les calories.
Les glucides, comme les autres macronutriments, ne peuvent pas être exclus de l’alimentation. N’oublions pas qu’ils sont le nutriment majeur des légumes, des fruits, des légumineuses, des céréales complètes, dont nous ne pouvons pas nous passer.
Que pensez-vous de la diète cétogène, dont on entend beaucoup parler actuellement ?
N’est-elle pas trop restrictive et contraignante ? Bien sûr. Elle est extrêmement contraignante et n’est pas tenable dans le temps. Élaborée il y a un siècle pour prendre en charge l’épilepsie chez l’enfant ne répondant pas au traitement, on découvre aujourd’hui son potentiel thérapeutique dans d’autres domaines ; notamment l’accompagnement du cancer et des maladies neurodégénératives. Mais, même dans ce domaine, les études manquent pour pouvoir établir une réelle efficacité sans risque. Ce régime, qui est très déséquilibré, génère de nombreuses carences, notamment du microbiote, et ne peut en aucun cas être tenu dans le temps, ce qui est malheureusement indispensable si l’on veut garantir une perte de poids durable.
Quels sont ses principaux avantages et inconvénients ?
Il est vrai que cette diète entraîne une perte de poids rapide, mais, pour moi, elle fait partie de ce concept d’amaigrissologie. Elle engendre beaucoup trop de déficits et n’est donc pas une option tenable dans le temps.
Comment optimiser la diète cétogène pour en diminuer les éventuels effets délétères ?
Pour les personnes qui souhaitent la mettre en oeuvre, il faut envisager une version hypotoxique, comportant notamment au moins une portion de fruits par jour, des légumes, du poisson plutôt que de la viande, et des bonnes graisses, que l’on va trouver notamment dans l’huile de colza, l’huile d’olive, les noix, l’avocat.…
Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs qui sont plutôt sucré que salé ?
Tout dépend de la situation de chacun. Le sucre ne tue pas, tout est question de modération. Mais il faut savoir qu’il est possible de se déshabituer progressivement d’envies d’aliments sucrés, tout comme il est possible de se déshabituer de manger trop salé.
Une alimentation trop pauvre en glucides, notamment lors du petit déjeuner ou du repas de midi, peut occasionner des envies irrépressibles de sucre dans l’après-midi et le soir.
Il peut également s’agir d’un trouble des neurotransmetteurs.
Il est de toute façon conseillé d’éviter les frustrations et de réapprendre à manger de façon présente, sans être en mode automatique, afin de retrouver de la satisfaction de manger et de profiter vraiment des petites douceurs que l’on s’octroie.
Un rééquilibrage alimentaire doit-il être toujours accompagné d’une prise de micronutriments ?
De nombreux déficits en micronutriments peuvent, en effet, expliquer une prise de poids ou une résistance à l’amincissement. Sans devoir nécessairement toujours passer par des compléments alimentaires, il est cependant indispensable d’évaluer la présence, ou non, de certains déficits et de les prendre en charge.
Accordons-nous trop d’importance à la notion d’index glycémique, et, si oui, pourquoi ?
Je pense qu’il s’agit d’une notion très importante mais que quelques connaissances suffisent à la mettre en pratique. Il faut éviter d’avoir en tête un contrôle permanent des index glycémiques car cela rend les apports alimentaires beaucoup trop contrôlés et peu spontanés. À partir du moment où l’on a compris que les fruits, les légumes, les noix, les légumineuses et les produits non transformés de façon générale ont un bon index glycémique, il n’est pas nécessaire de se promener avec ses tableaux en poche.
Conseilleriez-vous de faire une analyse du microbiote avant toute « révolution alimentaire personnelle » ?
Dans certains cas, cela peut être intéressant. Et c’est certainement l’avenir. Mais, aujourd’hui, une telle analyse n’est pas du tout indispensable, même si elle peut être utile. En revanche, évaluer certains marqueurs de son déséquilibre peut être utile afin de mieux cibler une prise en charge.
On connaît désormais l’importance du microbiote et de la supplémentation en probiotiques. Mais, ce que l’on sait moins, c’est que le choix des souches doit se faire en fonction de notre alimentation. Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs?
On connaît de mieux en mieux le rôle de certaines souches en particulier. Certaines sont plutôt anti-inflammatoires, d’autres vont plutôt améliorer la glycémie ou servir à fabriquer certains métabolites protecteurs, comme le butyrate. Tout va donc dépendre de la problématique initiale. Il ne faut pas croire que prendre des probiotiques est la solution miracle, elle peut être envisagée si c’est nécessaire et de façon personnalisée.
Pourquoi un manque de sérotonine nous pousse-t-il à des envies compulsives ? Comment y remédier ?
Notre corps est d’une intelligence remarquable. Lorsque nous manquons de sérotonine, cela engendre des envies compulsives pour des aliments glucidiques, car, pour fabriquer de la sérotonine dans le cerveau, il est nécessaire d’avoir une élévation, même légère, de l’insuline. Le corps pousse donc à manger du sucre afin de faciliter la production de sérotonine dans le cerveau.
Éviter les glucides n’est donc pas la solution, car cela peut, à terme, provoquer des pulsions alimentaires. Toute la stratégie va donc consister à favoriser la production de sérotonine en ayant des apports suffisants en glucides, mais aussi en introduisant tous les nutriments indispensables à la production de sérotonine, notamment du tryptophane, certains minéraux comme le fer, le zinc ou le magnésium, et des vitamines du groupe B.
Pour être efficace, une alimentation doit-elle être 100 % personnalisée ?
Bien entendu, il existe certains concepts valables pour tous, mais il n’est pas possible de faire des plans alimentaires qui s’appliquent à tout le monde. Nous avons tous nos besoins, nos goûts, nos habitudes, et il est indispensable de faire en sorte que le plan corresponde à tous ces aspects si l’on veut être capable de le maintenir dans le temps.
Pour nos lecteurs qui souhaiteraient perdre du poids durablement, quels conseils leur donneriez-vous pour mettre toutes les chances de leur côté ? Faut-il faire impérativement une prise de sang et une analyse du microbiote ?
Il va de soi que je ne peux que les inviter à lire mon livre, mais le premier conseil que je leur donnerais est celui d’arrêter de faire des régimes et de traumatiser son corps. Dans certains cas, une prise de sang peut s’avérer indispensable. Mais il s’agit d’une prise de sang à caractère nutritionnel, peu réalisée dans la pratique courante.
Le mot de la fin ?
Pour réussir, il ne faut pas être pressé·e. La tortue connaît mieux le chemin que le lièvre. Il faut prendre son temps, choisir le bon moment, trouver l’objectif qui parle au coeur, pas à la balance, et mettre en place uniquement des choses qui peuvent l’être de façon durable, avec bienveillance.
Véronique Liesse
www.veronique-liesse-nutrition.com
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