avec Angélique Houlbert
diététicienne-nutritionniste, chroniqueuse TV
Le foie gras, vous connaissez. Mais avez-vous entendu parler de la « maladie du foie gras », dont souffre plus d’1 personne sur 5 ? Il s’agit d’une surcharge du foie en graisses, qui n’est pas due à la consommation d’alcool mais au régime alimentaire que l’on suit et au manque d’exercice. Nous avons profité de la sortie de son livre Le Régime Nash contre la maladie du foie gras pour poser quelques questions à son auteur, Angélique Houlbert, diététicienne-nutritionniste, chroniqueuse TV pour Le magazine de la santé, sur France 5, et régulièrement expert-nutrition sur France Bleu Maine et pour la presse grand public (Femme Actuelle, Santé Magazine, Top Santé…).
Comment définiriez-vous la maladie du foie gras ? Que signifient NAFLD et NASH ?
C’est une accumulation de graisses dans le foie, mais aussi dans les muscles. Cette infiltration du foie par les graisses est appelée NAFLD pour non-alcoholic fatty liver disease – maladie du foie gras non alcoolique – et dans sa forme la plus avancée et sévère, la NASH, pour nonalcoholic steatohepatitis – stéatohépatite non alcoolique –, s’accompagnant d’inflammation et de fibrose. Le risque, à terme, est l’évolution vers une cirrhose non alcoolique, une insuffisance hépatique et une greffe du foie.
Combien touche-t-elle de personnes en France ?
Dans les pays développés, elle touche 20 à 40 % de la population adulte (1/3 en moyenne) et jusqu’à 20 % des enfants. Il faut savoir qu’au moins la moitié des diabétiques en sont atteints et près de 90 % des obèses également. C’est la raison pour laquelle il faut surveiller le tour de taille (il doit être inférieur à 80 cm pour les femmes et à 94 cm pour les hommes), puisque c’est un critère assez fiable d’une accumulation de graisses viscérales, et notamment de graisses au niveau hépatique.
Toutefois, comme c’est une maladie silencieuse, la plupart des malades ignorent qu’ils sont porteurs de cette pathologie.
En quoi est-elle une maladie du mode de vie ?
C’est une maladie dite de civilisation due à de mauvaises habitudes alimentaires et au manque d’activité physique. À l’heure actuelle, il n’existe aucun médicament pour la traiter mais, ce qui est rassurant, c’est qu’avec une modification du mode de vie (alimentation et activité physique), on peut l’inverser.
Pourquoi le foie joue-t-il un rôle fondamental dans notre santé au quotidien ?
C’est un des organes phares de notre organisme. C’est le plus gros et le plus lourd (il pèse environ 1,5 kg). Il filtre près d’1,5 l de sang par minute, fabrique la bile (et contribue donc à la digestion), détoxifie (alcool et autres toxiques, comme les médicaments, les pesticides…) et assure la stabilité de la glycémie.
Comment un foie devient-il gras ?
Cette maladie est essentiellement due à un excès de calories provenant d’aliments apportant trop de sucre (saccharose, fructose) et de féculents à IG (indice glycémique) élevés ; le tout couplé à un manque de dépenses énergétiques. Un foie ne devient pas « gras » à cause des graisses (lipides) consommées, mais bel et bien à cause des glucides ; à l’image des oies et des canards gavés avec du maïs pour produire du foie gras à Noël !
La NASH et le diabète sont ainsi deux maladies intimement reliées puisque le glucose en excès se transforme en graisses, qui s’infiltrent dans différents organes (foie, mais aussi muscles, coeur, pancréas…), créant ainsi un brouillage du signal de l’insuline et conduisant donc à une résistance à l’insuline.
Sur quels grands principes repose le régime NASH ? Comment le fait d’adopter un régime à IG bas permet-il de jouer sur la stéatose hépatique ?
Le régime NASH s’appuie sur l’éviction (partielle ou totale) des aliments contenant du sucre et, surtout, du fructose sous forme libre (jus de fruits, par exemple), et sur la mise en avant des féculents à IG bas.
Une première phase de 3 semaines consiste à créer un déficit calorique brutal, fondé sur le protocole de Newcastle (études réalisées sur des diabétiques) afin de désinfiltrer le foie de ses graisses, de perdre du poids et surtout de faire un véritable « reset » au niveau des habitudes alimentaires.
La deuxième phase de 4 semaines est basée sur l’adoption d’un régime méditerranéen à IG bas, dont le but est de continuer à faire diminuer les graisses hépatiques, perdre du poids, équilibrer la glycémie et maintenir les nouvelles habitudes alimentaires.
En quoi le régime cétogène peut-il être favorable pour retrouver un foie normal ?
Le régime cétogène est aussi une excellente alternative en cas de maladie du foie gras, notamment pour les personnes affichant un IMC normal (20-25), puisque l’apport en glucides étant très faible, il produit un effet similaire à celui du jeûne.
Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs qui veulent prendre soin de leur foie ?
Au niveau alimentaire, pour un foie en pleine santé, il est intéressant de miser tous les jours sur une alimentation à IG bas et à charge glycémique basse. Il faut également diminuer la quantité de fructose (aliments sucrés, sodas, jus de fruits…), augmenter la part des oméga 3 (huiles de lin, de caméline, de noix ; petits poissons gras issus de la pêche durable…) et faire le plein d’aliments riches en antioxydants protecteurs (végétaux frais, notamment).
Côté compléments alimentaires, il est aussi intéressant de faire plusieurs fois par an une cure de chardon marie (Silybum marianum), une plante hépatoprotectrice et ayant montré, dans des études cliniques, sa supériorité pour diminuer sensiblement les graisses hépatiques et protéger le foie.
Le mot de la fin ?
Même si le foie possède cette capacité extraordinaire de se régénérer, il faut en prendre soin au quotidien en faisant les bons choix nutritionnels, basés sur des aliments bruts, non transformés et, si possible, bio.
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